Quand le parent n’est plus que l’aidant de son enfant, les lignes doivent bouger

par | Mar 1, 2022 | Etat d'esprit, Trésors de parents

Quand on est parent d’un enfant avec handicap ou pathologie, on peut rapidement devenir son aidant à plein temps car le système a tendance à induire cela. La vigilance est requise pour pouvoir faire des ajustements quand c’est nécessaire.

En fait, vous avez à peine encaissé le choc du diagnostic et donc de cet avenir totalement chamboulé pour plus ou moins longtemps que vous voici en charge de missions diverses et variées : taxi, diététicien(ne), secrétaire qui jongle avec l’agenda pour les examens, consultations, prises en charge en tout genre, ou avec les dossiers MDPH, etc. Et le pire, c’est que bien souvent le système trouve cela juste normal, peu de professionnels s’assurent que vous êtes d’accord pour assumer tout cela, que vous êtes disponibles, que psychologiquement et physiquement, c’est possible pour vous … C’était à l’œuvre il y a 19 ans quand j’en ai fait l’expérience pour la 1ère fois et je constate que malheureusement c’est encore le cas pour beaucoup de parents que je croise aujourd’hui …

Le 2nd phénomène que je constate (selon mon parcours et celui des autres parents) est que, lorsqu’on a accepté certaines choses, les institutions partent du principe que vous acceptez TOUT, de fait.

C’est ainsi que peu à peu je me suis retrouvée à faire de plus en plus de soins à mon fils, que je suis devenue son infirmière, sa soignante, en plus d’être son aidante, sa secrétaire, sa sophrologue, son ambulancière, sa kiné, etc.  Jusqu’au jour où cela a été trop et que j’ai dit stop !

Comment faire cela ?

Quand on est pris dans ce tourbillon infernal, de ce rythme effréné du quotidien atypique, il est essentiel de faire des arrêts sur image réguliers.

Pourquoi ? 

Pour faire un état des lieux et interroger tout ce qui est à l’œuvre au regard des besoins de votre enfant, des vôtres, de vos valeurs et de ce qui fait sens.

Cela permet alors de modifier les termes des contrats relationnels pour le bien de tous, de replacer chacun à sa juste place, de poser des limites … jusqu’au prochain état des lieux !

Pour ma part, j’ai accepté de faire certains soins parce que cela répondait à mon besoin d’avoir la vie la plus normale possible. Entre 2010 et 2011, mon fils avait besoin de piqûres en sous cutanée matin et soir pour relancer sa motricité intestinale suite à une paralysie. Franchement, cela m’effrayait de le piquer, de lui faire mal, de lui faire des bleus mais l’organisation familiale est vite devenue compliquée car nous étions soumis aux horaires de l’infirmière (ce qui était logique) et cela perturbait notamment nos sorties du week-end mais également je ressentais cela comme trop intrusif dans notre foyer. Alors j’ai décidé d’assumer les piqûres du soir et du week-end et l’infirmière venait chaque matin en semaine, nous permettant ainsi de nous préparer, ma fille et moi, de façon plus sereine avant de partir à l’école et au travail. Je n’ai pas aimé le faire mais je savais pourquoi je le savais et cela m’apaisait.

J’ai également accepté de changer moi-même le bouton de gastrostomie (même si j’ai hurlé la 1ère fois que j’ai dû le faire en catastrophe, 3 semaines seulement après l’opération puisqu’il s’était arraché !) car cela nous évitait des déplacements au CHU alors que le changement de sonde ne prenait que quelques minutes et que c’était indolore pour mon grand.

J’ai dû me débrouiller pour faire de la kiné respiratoire les week-ends, à certaines périodes, parce que personne ne voulait se déplacer chez nous alors que nous avions une ordonnance. Et là, ce n’était pas un choix réel, conscient, c’était cela ou mon fils s’encombrait encore plus et risquait les détresses respiratoires …

Par contre, fin 2015, on m’a imposé de faire des séances de percussionnare à mon fils : c’était un appareil envoyant de l’air pulsé par la bouche, pour décoller ses sécrétions pulmonaires grâce aux vibrations. Cela me semblait une telle torture pour mon fils ! Et c’était moi, sa mère, qui lui faisait cela ! De plus, cela me prenait du temps le matin et le soir, sans parler du nettoyage, de la stérilisation et du séchage manuel minutieux de l’appareil pour éviter le développement des bactéries …Bref, je devenais 100% infirmière et tortionnaire et plus du tout une maman … Et je n’avais plus beaucoup de temps à consacrer à ma fille … Ma limite était dépassée. Au bout de seulement quelques semaines, j’ai imposé à l’école spécialisée de prendre en charge la séance du matin, malgré leurs réticences : c’étaient eux les professionnels, pourquoi me demander à moi, la maman, de faire cela ? Il ne me restait que la séance du soir que j’ai rapidement stoppée aussi car elle causait des détresses respiratoires …

Ce ne sont que quelques exemples qui me sont propres mais il y aurait des centaines de tomes à écrire si on compulsait tout ce qui est demandé aux parents d’enfants avec handicaps ou pathologies, sans vraiment se soucier de l’impact de tout cela sur l’aspect émotionnel, psychologique et organisationnel … des parents mais également de l’enfant … car est-ce juste qu’un enfant soit soigné par son parent, devenu aidant, parce que le système en place ne permet pas autre chose ?

Heureusement, il y a aussi des professionnels qui font leur maximum pour soulager les parents et je salue pleinement ces personnes car elles composent au mieux avec les moyens dont elles disposent.

En s’accordant de l’espace pour se questionner sur ce qui leur est imposé, de nommer ce qui est en place, de poser les limites, les parents offrent une chance au système d’évoluer … Peu à peu, certes, trop lentement assurément … Néanmoins, un pas reste un pas et cela permet d’en amorcer d’autres …

Tout cela permet alors aux parents de se respecter, d’être mieux respectés et donc de se préserver, de préserver leur vie de famille.

Je ne dis pas que cela se fait aisément, de façon fluide, sans accroc car, dans ce système, il y a plusieurs parties mais c’est possible de faire bouger les lignes, je l’ai expérimenté !

Vous avez besoin d’être accompagné(e) pour définir ce qui fait sens pour vous, pour clarifier vos limites de parent aidant, pour communiquer cela de façon plus sereine et affirmée ?

Contactez-moi !

Photo de Tara Winstead, de Pedro Figueras , de Kat Smith provenant de Pexels

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